Archives du quartier - Chapitre 1: La première fois
Voici le premier chapitre d'une série qui va vous permettre de
découvrir ou de redécouvrir des archives sur les débuts du quartier
piéton.
Vous comprendrez la philosophie du projet initial, le mode de fonctionnement prévu, vous assisterez au déploiement de la communication municipale, à la perception de la presse, celle des habitants...
Bienvenue à tous-tes dans le rétroviseur ! (c'est malin pour un piéton)
La première fois où j'ai eu connaissance du projet de piétonnisation du quartier Montorgueil Saint-Denis, c'est dans le Journal Le Monde, voici cet article qu'il est intéressant de lire aujourd'hui près de 30 ans plus tard.
Bonne lecture.
Fabien S

Article paru dans le journal Le Monde daté du 19 octobre 1989
Entre les Halles et la rue Réaumur
20 hectares du deuxième arrondissement vont être rendus aux piétons
Opération exemplaire dans le deuxième arrondissement: d’ici trois ans. une très vaste zone piétonne va être aménagée en douceur par un savant réaménagement de la voirie.
Jacques Chirac proposera au mois de novembre, au cours de la prochaine séance du Conseil de Paris, la création d’une vaste zone piétonne, plus de 20 hectares, dans le deuxième arrondissement. Le secteur concerné, aux abords, des Halles, est délimité par la rue Réaumur, le boulevard de Sébastopol, la rue Etienne-Marcel, la rue du Louvre et la rue d’Aboukir.
L'initiative est originale puisque ce sera sans doute la première fois que l’on rendra aux piétons dans le centre d’une grande capitale, et dans un quartier essentiellement résidentiel, une aussi grande surface.
Cette opération n’est en effet pas liée à une rénovation d'envergure ni à la mise en valeur d’un patrimoine historique et touristique. Pas d'immeubles abattus, pas d’expulsions, pas de préemptions.
mais un aménagement de la voirie étalé sur trois ans, de 1990 à 1993, pour « renverser le processus de dégradation de cette partie du quartier Bonne-NouvelIe », déclare Alain Dumait (UDF-PR) conseiller de Paris (1).
Que s’est-ii donc passé dans cet arrondissement somme toute "banalement parisien" ? Contrairement à ses voisins du centre de la capitale qui ont bénéficié de rénovations importantes (les Halles dans les premier et quatrième arrondissements) ou d’une restauration de prestige (le Marais dans les troisième et quatrième arrondissements), le deuxième, lui, est resté en l’état. Il a gardé ses petits logements, ses familles modestes et ses rues étroite (Saint-Sauveur, Marie-Stuart, Tiquetonne, par exemple) dont l'écartement na guère varié depuis l'époque médiévale. Ici, les trottoirs ne sont que les anciens «chasse-roues"...
Résultats: selon le recensement de 1982, 75% des logements (contre une moyenne de 15 % à Paris) sont soumis à la loi de 1948, et 65% d'entre eux sont dans un état "médiocre" ou "très médiocre"
Entre 1975 et 1982, la capitale a perdu 5 % de sa population alors que le deuxième arrondissement voyait disparaitre 23 % de ses habitants.
Se sont ajoutés le grignotage progressif du quartier par les activités de la confection qui débordent du Sentier et la saturation automobile. Les voitures sont enfermées dans des embouteillages permanents. Le stationnement anarchique, sur la chaussée aussi bien que sur les petits trottoirs, obligent jeunes et personnes âgées à se faufiler quotidiennement entre les véhicules... quand ils ont pu sortir de chez eux sans être bloqués par une camionnette en train décharger. Bref, la zone piétonne devient une nécessité très pratique.
Ce sera aussi un moyen de redorer le blason de l'arrondissement. « Si l'on veut sauver ce quartier de la ruine qui le menace, il faut choisir entre le piéton et l'automobiliste » affirme Alain Dumait. Il a choisi et a fait partager son choix à Jacques Chirac.
Les services de la. mairie de Paris ont donc lancé une étude approfondie dont le résultat sera soumis au cours des prochaines semaines aux édiles de la capitale. Les riverains, eux, auront été informés de ce projet par des réunions organisées à ce propos par les élus locaux.
La ville, en effet, ne se contentera pas de placer aux endroits stratégiques quelques bornes en fonte reliées les unes aux autres par des chaînes. Elle va, au contraire, « réaménager » l'ensemble de la voirie. Les trottoirs de la future zone piétonne seront conservés, l'asphalte noir de la chaussée sera remplacé par des petits pavés de granit blanc pour bien marquer la transformation du quartier. Des lanternes de style seront installées, des bancs placés entre le trottoir et la chaussée, qui comportera, en certains endroits, des marches très larges. Des fontaines apparaîtront notamment rue Montorgueil, l’épine dorsale de la zone, ou rue Saint-Denis. On plantera des arbres, parfois au milieu de la rue, et une décoration est prévue pour les murs pignons.
700 places de parking
Les rues situées à l'intérieur du périmètre seront soumises à la réglementation habituelle des zones piétonnes: circulation et stationnement interdits en permanence, sauf à certaines heures pour les riverains et les livraisons. Pour éviter le stationnement sauvage, comme c’est notamment le cas dans le secteur Halles-Beaubourg, les accès à ce nouveau quartier piétonnier seront réglementés par un système de contrôle automatique. Sept cents places de stationnement devront être créées pour répondre à la demande suscitée par l'aménagement envisagé. C’est une des difficultés de la mise en
œuvre du projet car l’espace, ici plus qu’ailleurs, fait défaut. Toujours est-il que trois permis de construire viennent d’être déposés pour ouvrir des parcs de stationnement rue Réaumur, place du Caire et rue Sainte-Foy. D’autres pourraient être créés boulevard de Sébastopol (entre la rue Rambuteau et la rue de Turbigo), rue Montmartre, rue de Palestro et rue Saint-Martin.
Trois ans seront nécessaires pour dessiner cette zone piétonne. Ce délai relativement long s’explique notamment par les travaux à engager pour modifier les réseaux installés dans un sous-sol particulièrement encombré et par les démarches occasionnées pour une modification du plan d’occupation des sols. D’autre part, le quartier est difficile d’accès. Pour éviter de stopper toute activité économique, les services de la ville interviendront par étapes et non simultanément dans
toutes les rues. Mais des septembre 1990, avant même que le décor soit planté, les 20 hectares du quartier Bonne-Nouvelle seront réservés aux piétons. Lorsqu’elle sera achevée en 1993, l’opération aura coûté 80 millions de francs, estime-t-on aujourd’hui.
JEAN PERRIN
(1) Alain Dumait a, en juillet l989, démissionné de son poste de maire du deuxième arrondissement pour se consacrer aux questions de circulation et de stationnement. Il a été remplacé par Mme Benoîte Taffin (UDF).
Vous comprendrez la philosophie du projet initial, le mode de fonctionnement prévu, vous assisterez au déploiement de la communication municipale, à la perception de la presse, celle des habitants...
Bienvenue à tous-tes dans le rétroviseur ! (c'est malin pour un piéton)
La première fois où j'ai eu connaissance du projet de piétonnisation du quartier Montorgueil Saint-Denis, c'est dans le Journal Le Monde, voici cet article qu'il est intéressant de lire aujourd'hui près de 30 ans plus tard.
Bonne lecture.
Fabien S

Article paru dans le journal Le Monde daté du 19 octobre 1989
Entre les Halles et la rue Réaumur
20 hectares du deuxième arrondissement vont être rendus aux piétons
Opération exemplaire dans le deuxième arrondissement: d’ici trois ans. une très vaste zone piétonne va être aménagée en douceur par un savant réaménagement de la voirie.
Jacques Chirac proposera au mois de novembre, au cours de la prochaine séance du Conseil de Paris, la création d’une vaste zone piétonne, plus de 20 hectares, dans le deuxième arrondissement. Le secteur concerné, aux abords, des Halles, est délimité par la rue Réaumur, le boulevard de Sébastopol, la rue Etienne-Marcel, la rue du Louvre et la rue d’Aboukir.
L'initiative est originale puisque ce sera sans doute la première fois que l’on rendra aux piétons dans le centre d’une grande capitale, et dans un quartier essentiellement résidentiel, une aussi grande surface.
Cette opération n’est en effet pas liée à une rénovation d'envergure ni à la mise en valeur d’un patrimoine historique et touristique. Pas d'immeubles abattus, pas d’expulsions, pas de préemptions.
mais un aménagement de la voirie étalé sur trois ans, de 1990 à 1993, pour « renverser le processus de dégradation de cette partie du quartier Bonne-NouvelIe », déclare Alain Dumait (UDF-PR) conseiller de Paris (1).
Que s’est-ii donc passé dans cet arrondissement somme toute "banalement parisien" ? Contrairement à ses voisins du centre de la capitale qui ont bénéficié de rénovations importantes (les Halles dans les premier et quatrième arrondissements) ou d’une restauration de prestige (le Marais dans les troisième et quatrième arrondissements), le deuxième, lui, est resté en l’état. Il a gardé ses petits logements, ses familles modestes et ses rues étroite (Saint-Sauveur, Marie-Stuart, Tiquetonne, par exemple) dont l'écartement na guère varié depuis l'époque médiévale. Ici, les trottoirs ne sont que les anciens «chasse-roues"...
Résultats: selon le recensement de 1982, 75% des logements (contre une moyenne de 15 % à Paris) sont soumis à la loi de 1948, et 65% d'entre eux sont dans un état "médiocre" ou "très médiocre"
Entre 1975 et 1982, la capitale a perdu 5 % de sa population alors que le deuxième arrondissement voyait disparaitre 23 % de ses habitants.
Se sont ajoutés le grignotage progressif du quartier par les activités de la confection qui débordent du Sentier et la saturation automobile. Les voitures sont enfermées dans des embouteillages permanents. Le stationnement anarchique, sur la chaussée aussi bien que sur les petits trottoirs, obligent jeunes et personnes âgées à se faufiler quotidiennement entre les véhicules... quand ils ont pu sortir de chez eux sans être bloqués par une camionnette en train décharger. Bref, la zone piétonne devient une nécessité très pratique.
Ce sera aussi un moyen de redorer le blason de l'arrondissement. « Si l'on veut sauver ce quartier de la ruine qui le menace, il faut choisir entre le piéton et l'automobiliste » affirme Alain Dumait. Il a choisi et a fait partager son choix à Jacques Chirac.
Les services de la. mairie de Paris ont donc lancé une étude approfondie dont le résultat sera soumis au cours des prochaines semaines aux édiles de la capitale. Les riverains, eux, auront été informés de ce projet par des réunions organisées à ce propos par les élus locaux.
La ville, en effet, ne se contentera pas de placer aux endroits stratégiques quelques bornes en fonte reliées les unes aux autres par des chaînes. Elle va, au contraire, « réaménager » l'ensemble de la voirie. Les trottoirs de la future zone piétonne seront conservés, l'asphalte noir de la chaussée sera remplacé par des petits pavés de granit blanc pour bien marquer la transformation du quartier. Des lanternes de style seront installées, des bancs placés entre le trottoir et la chaussée, qui comportera, en certains endroits, des marches très larges. Des fontaines apparaîtront notamment rue Montorgueil, l’épine dorsale de la zone, ou rue Saint-Denis. On plantera des arbres, parfois au milieu de la rue, et une décoration est prévue pour les murs pignons.
700 places de parking
Les rues situées à l'intérieur du périmètre seront soumises à la réglementation habituelle des zones piétonnes: circulation et stationnement interdits en permanence, sauf à certaines heures pour les riverains et les livraisons. Pour éviter le stationnement sauvage, comme c’est notamment le cas dans le secteur Halles-Beaubourg, les accès à ce nouveau quartier piétonnier seront réglementés par un système de contrôle automatique. Sept cents places de stationnement devront être créées pour répondre à la demande suscitée par l'aménagement envisagé. C’est une des difficultés de la mise en
œuvre du projet car l’espace, ici plus qu’ailleurs, fait défaut. Toujours est-il que trois permis de construire viennent d’être déposés pour ouvrir des parcs de stationnement rue Réaumur, place du Caire et rue Sainte-Foy. D’autres pourraient être créés boulevard de Sébastopol (entre la rue Rambuteau et la rue de Turbigo), rue Montmartre, rue de Palestro et rue Saint-Martin.
Trois ans seront nécessaires pour dessiner cette zone piétonne. Ce délai relativement long s’explique notamment par les travaux à engager pour modifier les réseaux installés dans un sous-sol particulièrement encombré et par les démarches occasionnées pour une modification du plan d’occupation des sols. D’autre part, le quartier est difficile d’accès. Pour éviter de stopper toute activité économique, les services de la ville interviendront par étapes et non simultanément dans
toutes les rues. Mais des septembre 1990, avant même que le décor soit planté, les 20 hectares du quartier Bonne-Nouvelle seront réservés aux piétons. Lorsqu’elle sera achevée en 1993, l’opération aura coûté 80 millions de francs, estime-t-on aujourd’hui.
JEAN PERRIN
(1) Alain Dumait a, en juillet l989, démissionné de son poste de maire du deuxième arrondissement pour se consacrer aux questions de circulation et de stationnement. Il a été remplacé par Mme Benoîte Taffin (UDF).
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